Par la force de Munch, je ne suis pas un poisson pélagique
La langouste disparaît dans notre monde meilleur parce que ce n'est pas possible autrement. Depuis quelques temps la langouste se transforme en sardine, maquereau, thon ou bien au choix hareng, anchois ; on lui laisse le choix du n'importe quel poisson pélagique pourvu qu'elle comme tout le monde travaille.
Elle est prête à tout pour tenter d'exister.
Un poisson pélagique vit généralement en bande et nage en banc comme les sardines, les maquereaux, les thons ou bien au choix les harengs, les anchois. Un banc est constitué de poissons pélagiques de même taille, il peut être composé de plusieurs espèces différentes, tous les individus ayant quasiment la même longueur.
Le poisson pélagique, c'est comme toi dans la vraie vie du travail qu'on vient de lui proposer de choisir.
Le poisson pélagique est inscrit dans une chaîne alimentaire : le hareng est mangé par la sardine, elle-même par le maquereau, lui-même par le thon qui finira un jour, peut-être, dans l’estomac d’un requin, le superprédateur qui lui n'est pas menacé par personne sauf par l'homme autre grand superprédateur qui peut-être un jour se fera lui-même bouffer par lui-même.
Elle est prête à tout puisqu'elle n'a pas d'autres choix de langouste.
Elle est prête à devenir hareng. Elle aura une vie autrement voulue comme la vie des autres parce que ce n'est pas possible autrement. Elle se résigne à dire comme les autres que tout commence par là. Là comme dire sa nouvelle vie d'anchois parce qu'on lui laisse le choix. Parce que le poisson pélagique grégaire profite de la force du groupe qui protège chaque individu face aux prédateurs. De loin la masse groupale du groupe ressemble à un gros poisson qui effraie le prédateur. Pour avoir une chance de survivre, elle est prête à s'abandonner dans la masse pélagique. A vivre comme une sardine. Elle aurait préféré langouste, ce n'est pas possible parce que ce n'est pas possible autrement
Elle vit dans ce monde meilleur où le vivre langouste est interdit. Pour survivre, elle doit se contenter de la masse pélagique parce que ce n'est pas possible autrement. Elle se dégoûte. Elle qui a la chance d'avoir des papiers — pas comme ceux et celles qui meurent en pleine mer — elle va se contenter en sardine, maquereau, thon, hareng ou au choix anchois. Elle se hait et de ne pas en profiter pour vivre sa vie de langouste pas comme tout le monde — alors que d'autres meurent en pleine mer. Elle respire dans un monde où d'autres meurent en pleine mer parce que les uns capitalisent la rentabilité de l'entreprise en nous racontant une histoire du banc de poissons pélagiques ce n'est pas possible autrement. On ne lui laisse pas le choix, elle hésite.
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